Le 15 Juin 2023, l’assemblée nationale a adopté le projet de loi « visant à améliorer l’accès aux soins par l’engagement territorial des professionnels » et notamment l’article 3 qui pose le principe d’une adhésion par défaut des professionnels de santé à la CPTS de leur territoire.
« Art. L. 1434-12-3. – Lorsque la communauté professionnelle territoriale de santé a conclu
la convention mentionnée au I de l’article L. 1434-12-2, l’ensemble des professionnels de
santé relevant d’une des conventions mentionnées aux articles L. 162-14-1 et L. 162-16-1 du
code de la sécurité sociale et les centres de santé relevant de l’accord mentionné à l’article L. 162-32-1 du même code en deviennent membres, sauf opposition de leur part effectuée dans des conditions définies par arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale. Ces mêmes professionnels de santé peuvent à tout moment se retirer de la communauté professionnelle territoriale de santé à laquelle ils ont été rattachés. »
L’URPS Médecins Libéraux de Bretagne s’oppose à cette proposition de loi, et entend les voix des
équipes des CPTS bretonnes qui s’inquiètent également des conséquences négatives de ce texte.
Cette disposition est totalement contraire à l’esprit même des CPTS et d’engagement des
professionnels de santé dans ces organisations. L’URPS ML Bretagne estime que l’adhésion doit rester un engagement personnel et volontaire des médecins libéraux, dans des organisations collectives qui ont fait la preuve de leur intérêt.
Aujourd’hui, des médecins libéraux généralistes et spécialistes s’investissent dans les 32 CPTS existantes ou en projet en Bretagne.
Ils y renforcent leurs liens entre eux et avec leurs collègues des autres professions de santé,
apprennent à mieux se connaitre et à travailler ensemble au bénéfice de leurs patients.
Les témoignages des médecins que nous avons recueillis sont la preuve de l’intérêt que peuvent trouver dans les CPTS certains d’entre nous. Ils font librement le choix de ce mode d’exercice, comme d’autres ont fait ou feront encore demain d’autres choix d’organisation professionnelle tout aussi légitimes.
Alors certes, l’obligation d’adhérer à la CPTS de son territoire est nuancée dans le projet de loi puisque le texte précise que les professionnels « deviennent membres, sauf opposition de leur part » (mais cela est conditionné à un arrêté du Ministère de la Santé) et « Ces mêmes professionnels de santé peuvent à tout moment se retirer de la communauté professionnelle territoriale de santé à laquelle ils ont été rattachés. »
Néanmoins, nous interpellons aujourd’hui nos patients, nos tutelles, et surtout les députés et
sénateurs qui voteront ce projet de loi. Est-ce qu’une CPTS fonctionnera mieux avec 100 %
d’adhésions automatiques des professionnels de santé, simples papiers administratifs, plutôt
qu’avec un vrai engagement professionnel ? Pensez-vous que les coopérations professionnelles se déclarent ?
L’URPS Médecins Libéraux estime de son côté que ces coopérations doivent se construisent
progressivement, dans une dynamique d’intelligence collective entre tous les acteurs de la santé, et avec, en soutien, la confiance des institutions et des collectivités locales.
Quel est le message envoyé par l’adoption de cet article si ce n’est une remise en cause de cette confiance ?
L’empilement d’injonctions, d’obligations et de contraintes ont un effet délétère sur nos pratiques professionnelles. Elles désorganisent complètement les territoires, et démotivent les professionnels de santé qui s’engagent tous les jours auprès de leurs patients. Cela aura pour conséquence de renforcer les problématiques d’accès aux soins, alors que de nombreux projets de CPTS sont en cours pour tenter d’y répondre !
Faites plutôt confiance aux professionnels de santé qui s’organisent tous les jours sur les territoires pour répondre aux besoins de la population, et ont à cœur de préserver la qualité des soins et de leurs pratiques professionnelles.
Dr LABARTHE, Président de l’URPS MLB