Échanges informels entre Dr Cédric ARVIEUX, infectiologue au CHU de Rennes
& Dr Thierry LABARTHE, médecin généraliste élu de l’URPS MLB
Chers collègues,
En ce début d’année 2021, avec le rush observé en matière de vaccination Covid-19, nous avons repris nos points réguliers avec nos collègues infectiologues du CHU de Rennes. L’intérêt pour ces informations échangées, entre confrères de la ville et de l’hôpital, est réellement partagé des deux côtés !
Malgré le caractère fluctuant de nos perceptions et des actualités liées à la Covid-19, nous avons décidé de vous diffuser ces « points infectieux » synthétisant ces « discussions éphémères ». Nous espérons que vous y trouverez des informations utiles, et nous vous invitons à garder à l’esprit qu’il s’agit d’échanges informels à un instant T… !
Ces échanges s’inscrivent dans la lignée de la lettre d’information des infectiologues bretons, dont le premier numéro spécial Covid-19 avait été diffusé le 27 octobre 2020 (lettre que vous pouvez retrouver en ligne).
Bonne lecture,
Dr Thierry Labarthe
La neige qui a nimbé la Bretagne de sa jolie blancheur, a permis de faire passer l’épidémie Covid en deuxième point des informations nationales, mais nos quotidiens de médecins sont toujours très impactés par l’épidémie : prise en charge des malades, troubles psycho-sociaux, contacter-tracer-isoler, vaccination, sans oublier les évolutions épidémiologiques et virologiques.
Nous vous proposons aujourd’hui un point particulier sur les dernières recommandations en matière de variants, et quelques précisions concernant l’arrivée du vaccin Astra-Zeneca.
En parallèle de ses rendez-vous infectieux, l’URPS MLB travaille avec les infectiologues bretons à l’organisation de webinaires, auxquels seraient conviés les Médecins Libéraux bretons. Pour que ces rendez-vous puissent répondre au mieux à vos demandes et à vos préoccupations, nous vous remercions de nous remonter toutes vos questions à l’adresse infocorona@urpsmlb.org !
La progression des variants au cœur des préoccupations
– Tout test positif doit désormais faire l’objet d’une RT-PCR de criblage en seconde intention, réalisée dans un délai de 36 heures maximum, afin de déterminer s’il s’agit d’une contamination par une variante d’intérêt (Cf. note DGS Urgent du 07/02/2021 téléchargeable en suivant ce lien).
– Instauration de mesures différenciées pour les variants sud-africain (20H/501Y.V2) et brésilien (20J/501Y.V3), justifiées par le fait qu’ils seraient moins sensibles aux vaccins : durée d’isolement portée à 10 jours (vs 7 jours) et pouvant être levée après obtention d’un résultat de test négatif. En cas de test positif, l’isolement est prolongé de 7 jours ; sans nouveau test à l’issue des 17 jours totaux.
– La surexpression du variant UK en Bretagne est faussée en raison d’un cluster dans un ES de la périphérie rennaise, ce qui a gonflé les chiffres sans refléter la diffusion sur l’ensemble de nos quatre départements bretons.
– Probabilité de 50% de variant UK à l’horizon mi-mars 2021.
L’épidémie
– Au niveau régional : persistance d’un gros décalage entre le 35 et les autres départements bretons plus épargnés pour le moment. Toujours de nombreux clusters hospitaliers.
– Phase épidémique très élevée, mais évolution progressive avec 140 hospitalisations au CHU de Rennes (à noter, c’est supérieur au maximum observé jusqu’alors). Réanimation assez stable. Ce décalage entre nombre d’hospitalisations et d’entrées en réa s’explique peut-être par un bon usage de la corticothérapie en milieu hospitalier, étant précisé qu’en ville il convient de rester sur un traitement symptomatique.
– A signaler, une étude publiée le 09/02/2021 par le GIS EPI-PHARE (constitué par la Cnam et l’ANSM) : « Maladies chroniques, états de santé et risque d’hospitalisation et de décès hospitalier pour COVID-19 lors de la première vague de l’épidémie en France: Étude de cohorte de 66 millions de personnes ». Les résultats confirment que les personnes âgées sont de loin les plus fragiles face à la Covid-19. De plus, les patients les plus vulnérables face à ce virus sont ceux souffrant d’une des sept pathologies suivantes : trisomie 21, retard mental, mucoviscidose, insuffisance rénale chronique terminale sous dialyse, cancer actif du poumon, ainsi que transplantation rénale ou transplantation du poumon.
Globalement, R x 10 pour ces patients contre R x 1,5 pour les patents VIH, diabétiques ou obèses.
Cette étude est téléchargeable en suivant ce lien.
– A propos des EHPAD, injections des 2e doses en cours. Dans la mesure où la campagne de vaccination a débuté lors de la poussée épidémique, il conviendra d’attendre plusieurs mois et de prendre du recul pour en analyser les effets.
La vaccination
– AstraZeneca : pour le moment indiqué pour l’ensemble des professionnels de santé et du médico-social de moins de 65 ans + pour les personnes de 50 à 64 ans, avec une priorité aux patients souffrant de comorbidités.
Sur les polémiques suscitées par ces questions relatives à l’âge, vous pouvez consulter pour mémoire le RDV infectieux n°2 de l’URPS en suivant ce lien.
Cela est à mettre en lien avec la complexité d’analyse induite par les frictions entre le politique et le scientifique, cf. par exemple un article en ligne du British Medical Journal du 03/02/3021 qui propose une synthèse critique sur une publication non encore sortie dans The Lancet…!!
Pour autant, les études complémentaires actuellement conduites sur AstraZeneca devraient permettre de dissiper ces polémiques d’ici peu et répondre à la possibilité de vacciner les > de 65 ans.
Il semblerait y avoir plus d’effets secondaires à type de syndrome pseudo-grippal, ce qui n’est pourtant pas ressorti sur la pharmacovigilance britannique performante.
Il est fort probable que d’ici peu, soit annoncée une nouvelle recommandation, à savoir repousser à 12 semaines la deuxième dose, qui confèrerait un taux de couverture à 92% vs 60-70% à 4 semaines (source COVIVAC).
Du fait de ses conditions de conservation, AstraZeneca est le vaccin qui pourrait être mis à disposition de la médecine de ville très prochainement. Les modalités de mise en œuvre sont attendues.
– Pfizer, Moderna et AstraZeneca sont les trois vaccins désormais administrés au CHU de Rennes, suivant les recommandations des populations cibles.
– Question reçue : j’ai fait la Covid en novembre et j’ai un taux d’anticorps à 200, dois-je me faire vacciner? A ce jour, oui ! En l’absence de certitude sur ces anticorps neutralisants ou non, un délai de 3 mois s’applique pour débuter la vaccination.
– Quid de Spoutnik V ? Si les données de l’étude sont avérées, et bien cela confèrerait un vaccin de très bonne qualité… (à suivre)
A méditer : vers un confinement prochain ?
– De plus en plus de voix se font entendre, en faveur d’un confinement. Cf. en ligne la tribune publiée dans Le Monde le 09/02/2021 : « « Confinons vite, fort, mais le moins de temps possible » : l’appel du directeur médical de crise de l’AP-HP » (accès réservé aux abonnés).
– Le confinement peut encore être une solution laissant, sur 3-4 semaines, la possibilité de vacciner massivement les cibles. En effet, nous sommes encore trop éloignés de l’été, et est évoquée une possible moindre diffusion selon les cycles épidémiques viraux connus à partir de la fin-mai début-juin et pas avril (tout cela reste des projections…).
– Entre projection épidémiologique et avis scientifique , d’autres composantes entrent en jeu comme la paix sociale, mais aussi la souffrance psychique induite par ces mesures, qui semblent réellement être prises au sérieux.
Télécharger ce 3e RDV infectieux Covid-19 de l’URPS MLB du 10 février 2021 en version PDF
Retrouvez les précédents n° du RDV infectieux Covid-19 de l’URPS MLB sur notre site :
– n°2 Vaccination et épidémie en Bretagne, du 3 février 2021 : en suivant ce lien
– n°1 La Vaccination en Bretagne, du 27 janvier 2021 : en suivant ce lien
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