Médecins libéraux bretons : bien préparer son départ à la retraite.
Mettre un terme à sa carrière de médecin libéral en Bretagne est une décision importante qui nécessite une préparation en amont. Que vous soyez médecin généraliste ou spécialiste, les démarches administratives, la transmission de votre activité et la gestion de vos droits doivent être anticipées.
1- Quel âge pour partir à la retraite ?
L’âge légal de départ à la retraite pour les médecins libéraux est actuellement fixé à 62 ans, mais le montant de votre pension dépendra du nombre de trimestres validés. Un départ à taux plein est généralement possible à 67 ans. La CARMF (Caisse Autonome de Retraite des Médecins de France) met à disposition des simulateurs pour estimer vos droits selon votre situation. Anticiper ces éléments vous permet d’optimiser vos conditions de départ et de préparer plus sereinement cette nouvelle étape.
2- Anticiper sa cessation d’activité
Il est recommandé d’initier les démarches au moins 12 mois avant la date prévue de départ. Cela vous laisse le temps de contacter la CARMF, de réaliser un bilan patrimonial et de planifier la transmission de votre patientèle.
3- Effectuer les démarches réglementaires
Les médecins libéraux bretons doivent notifier leur départ au Conseil départemental de l’Ordre, à la CPAM (Caisse Primaire d’Assurance Maladie), et à l’URSSAF. Il faut aussi résilier les contrats professionnels (assurances, logiciel métier, services de secrétariat…) et gérer les dernières déclarations fiscales.
Cumul emploi-retraite : une option souvent méconnue
Il est possible, sous certaines conditions, de continuer à exercer après la liquidation de vos droits à la retraite. Le cumul emploi-retraite permet ainsi de prolonger votre activité libérale à temps plein ou partiel, selon son choix et son éligibilité.
Les deux régimes de cumul existants
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Le cumul intégral
Sans plafond de revenus, est accessible si vous avez atteint l’âge légal et justifiez d’une retraite à taux plein ; liquidé toutes vos retraites obligatoires (de base et complémentaires) en France et à l’étranger.
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Le cumul plafonné
Limité à un revenu annuel net de 47 100 €, s’applique si ces conditions ne sont pas remplies. Au-delà, la pension est partiellement suspendue.
À noter 📝
Certains actes échappent à cette limite, notamment ceux réalisés dans le cadre de la permanence des soins, de la régulation médicale (SAMU, SAS), ou encore les missions outre-mer ou humanitaires. Une souplesse précieuse pour les médecins souhaitant s’investir autrement tout en maintenant une activité modérée. En cumul, les cotisations à la CARMF ne donnent plus lieu à des droits supplémentaires, sauf pour le régime de base (depuis 2023, dans le cas d’un cumul intégral).
4- Gestion du cabinet et aspects juridiques
Un départ à la retraite ne concerne pas uniquement la patientèle. Si vous êtes employeur, vous devrez également gérer la situation de vos salariés : préavis, transfert ou rupture de contrat, information et accompagnement. Un échange avec un expert-comptable ou un avocat peut vous aider à sécuriser cette étape. Pour vous aider, le Groupement d’Employeurs Santé Service (GE Santé Service), soutenu par l’URPS Médecins Libéraux de Bretagne, propose des solutions RH mutualisées. Il peut vous accompagner dans la gestion des ressources humaines en fin d’activité, la recherche de remplaçants ou la reprise partielle de vos salariés par d’autres structures du territoire.
Dans le cadre d’un exercice en société (SCM, SELARL, etc.), il faudra également organiser la cession de vos parts sociales ou la dissolution si vous êtes associé unique. Ces démarches ont des implications fiscales, juridiques et organisationnelles importantes qu’il est préférable d’anticiper au moins un an avant votre départ.
5- Transmettre son cabinet en Bretagne
Dans de nombreuses zones de Bretagne, le départ d’un médecin peut fragiliser l’accès aux soins. C’est pourquoi anticiper la reprise de son activité est essentiel. Vous pouvez publier une annonce, accueillir un remplaçant en amont, ou passer par votre réseau local. Une présentation claire de votre activité et un accompagnement progressif faciliteront la passation.
6- Préparer sa retraite financièrement
Le médecin libéral perçoit sa retraite via trois régimes :
- la base CARMF,
- la complémentaire CARMF
- et l’ASV (Avantage Social Vieillesse).
Avant le départ, vérifiez le nombre de trimestres validés, l’âge de départ possible, et l’impact de votre dernière année d’activité. En cas de vente du cabinet, certaines exonérations de plus-value peuvent s’appliquer. N’hésitez pas à consulter un conseiller spécialisé en retraite libérale.
7- Et après ? Préserver le lien, se réinventer
Mettre fin à son activité libérale ne signifie pas rompre avec la médecine. Pour de nombreux médecins libéraux bretons, le lien avec la patientèle est fort, parfois émotionnellement difficile à rompre. C’est pourquoi il est essentiel de prévoir un accompagnement dans cette phase de transition. Prendre le temps de dire au revoir, de transmettre les dossiers avec soin, et d’échanger avec ses patients peut favoriser une cessation plus apaisée.
Par ailleurs, la retraite n’exclut pas l’engagement médical. Certains choisissent de continuer à exercer sous d’autres formes : participation à la régulation médicale, missions humanitaires, actions de santé publique ou renforts ponctuels en Outre-mer.
Ces expériences permettent de rester actif tout en sortant du cadre traditionnel du cabinet, et sont particulièrement précieuses dans les contextes sous tension.
Témoignages 💬
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Médecin généraliste à la retraite dans le Finistère
Le 30 septembre 2023 à 19h30, j’ai terminé une carrière commencée le 1er avril 1987, dans le même cabinet médical en bord de mer que je n’ai jamais quitté. J’y ai vécu des moments forts, parfois difficiles, mais toujours enrichissants. Je n’ai jamais regretté de m’être associé avec mes trois confrères dans ce lieu spacieux et agréable, où j’ai activement participé à la modernisation et à l’amélioration des conditions de travail.
Avec le temps, j’ai vu partir deux associés à la retraite et accueilli deux nouveaux confrères. J’ai commencé à préparer mon propre départ deux à trois ans à l’avance. Une jeune consœur, intéressée par la reprise, s’est progressivement intégrée grâce à une transition étalée sur six mois. J’ai été fier de contribuer à la féminisation de l’équipe, et heureux que mes confrères acceptent cette nouvelle associée avec enthousiasme.
Ma dernière consultation, je l’ai partagée avec un ami venu trinquer avec moi : un moment symbolique plutôt qu’un vrai adieu. Depuis, je croise d’anciens patients bien suivis, ce qui me rassure. Je ne regrette pas d’avoir arrêté : j’ai gardé une petite activité libérale, indépendante de la CPAM.
Cette fin de carrière, bien que simple, me ressemble. J’y ai mis du cœur, de la réflexion… et un peu de chance aussi. Je souhaite à d’autres de pouvoir vivre une transition aussi sereine.
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Médecin généraliste à la retraite en Ille-et-Vilaine
Mon départ à la retraite n’a pas été une fin, mais le début d’une nouvelle étape de ma vie professionnelle. Après plusieurs décennies de médecine générale, exercée dans la même ville – seule d’abord, puis en association dans trois cabinets successifs – j’ai transmis ma patientèle à un jeune confrère, prêt à prendre la relève.
Ces années resteront gravées en moi : les joies, les épreuves, les liens profonds tissés avec mes patients, et tout ce que j’ai appris à leur contact, bien au-delà de la médecine.
C’est pourquoi j’ai choisi de ne pas arrêter totalement. Je poursuis aujourd’hui mon activité sous forme de remplacements. Cela me permet de rester engagée dans ce métier que j’aime, tout en aménageant du temps pour ma famille et d’autres projets.
Je continue à venir en renfort auprès de collègues et amis de longue date, notamment dans un groupe de 10 praticiens où les besoins en remplaçants sont fréquents. Je reste aussi ouverte à intervenir dans des zones en tension. Grâce à notre statut libéral, cette transition douce est possible — et je la savoure pleinement.